Crise de la zone euro: Vers un septembre noir?




Une personne place des billets en euro devant un drapeau européen.
Après le calme, la tempête? Tous les éléments étaient réunis pour vivre un mois d’août aussi traumatisant que l’an dernier, ou même davantage», analyse Bruno Cavalier, chef économiste chez Oddo Securities. En effet, entre une Europe en récession, «des dirigeants divisés ou irrésolus», des pays comme l’Espagne et l’Italie devant emprunter à des taux très élevés, le cocktail s’annonçait détonnant. Et pourtant, jusqu’ici la catastrophe annoncée ne s’est pas matérialisée.

Le choc de la BCE

Depuis un mois, le CAC 40 a même pris plus de 10% faisant route vers les 3.500 points. Aux yeux de Bruno Cavalier, le mérite de ce répit revient tout entier au président de la BCE qui a affirme être prêt «à faire tout ce qui est nécessaire pour préserver l'euro». Une formule choc qui a permis dans la foulée aux investisseurs de se détendre. «Mario Draghi n’a pas tort d’essayer de convaincre les marchés que l’euro est irréversible. Mais le simple fait de le dire nourrit malheureusement le doute», nuance René Defossez, économiste chez Natixis. «Le plan Draghi souffre, à ce stade, d’un considérable manque de détails: date de mise en œuvre, montant et durée de l’intervention, ce qui est propice à susciter rumeurs et démentis», renchérit son homologue de chez Oddo.

Le patron de la BCE a suscité beaucoup d’espoirs. Le risque est de créer une immense déception si l’intervention de l’institution de Francfort devait être abandonnée, différée ou dénaturée en raison de l’hostilité allemande à tout geste susceptible d’attiser l’inflation et de favoriser le laxisme budgétaire des Etats. Sa prochaine conférence de presse à l’issue de la réunion, le 6 septembre sera donc suivie à la loupe.

Quand l’Espagne demandera-t-elle de l’aide?

L’éventuelle action de la BCE dépendra dans le même temps de la décision de l’Espagne de demander l’aide au pare-feu de la zone euro pour renflouer son économie prise à la gorge par l’effondrement du secteur bancaire, en raison de l’explosion de la bulle immobilière. Car la BCE n’interviendra pas pour racheter de la dette espagnole tant que Madrid n’aura pas appelé à l’aide le Fonds européen de stabilité financière (FESF). Jusqu’ici le Premier ministre Mariano Rajoy s’y refuse de peur de se voir imposer des conditions de restructuration drastiques.

Mais ce n’est pas tout. «Retenez votre souffle», suggère Bruno Cavalier. En septembre, les attentes concernant la gestion de la crise en zone euro sont «très élevées.»

Les sages de Karlsruhe attendus au tournant

Le 12 septembre, la cour constitutionnelle allemande de Karlsruhe rendra sa décision sur la légalité du fonds de secours permanent de la zone euro, le Mécanisme européen de stabilité (MES) qui prendra la suite du FESF. Berlin ne peut le ratifier sans ce feu vert. Au même moment, les Néerlandais organiseront des élections législatives anticipées qui voient les socialistes, eurosceptiques au coude à coude dans les sondages avec les libéraux. Le risque? Une «radicalisation de la position des Pays-Bas dans les négociations européennes», indique Bruno Cavalier.

La Grèce crie famine

Dans la foulée, la Troïka des créanciers internationaux (UE-FMI-BCE) doit rendre son rapport sur l'avancement des réformes mises en œuvre par les autorités grecques dont dépend le versement d'une tranche d'aide supplémentaire de 31,5 milliards d'euros. Le Premier ministre grec Antonis Samaras voudrait obtenir un sursis de deux ans, renvoyant à 2016 le retour à l'équilibre des comptes publics jusque là prévu pour 2014. «Nein», répond pour l’instant l'Allemagne en attendant de prendre connaissance des conclusions des experts.

>> «La Grèce est déjà plus ou moins sortie de la zone euro»

Et les 14 et 15 septembre, les ministres des Finances de l'Union européenne se réuniront à Chypre. Au menu de la rencontre: des discussions sur le contenu des programmes d’assistance à l’intention de la Grèce, de Chypre, voire à l’Espagne et à l’Italie.

Encore vingt ans de crise?

C’est peu dire que la rentrée risque d’être mouvementée. Et ça pourrait durer. Dans une récente note de recherche, Patrick Artus, directeur des études économiques de Natixis estime que la crise de la zone euro peut encore durer vingt ans. Selon lui, elle sera terminée notamment quand les ménages se seront suffisamment désendettés, les économies auront recréé les emplois perdus dans l’industrie et dans la construction et les déficits publics auront été fortement réduits. On en est loin.

«Il est grand temps que les gouvernements européens prennent des initiatives plus percutantes dans le sens de l’intégration, qu’ils cessent de «courir» derrière les marchés, voire qu’ils provoquent, via l’instabilité politique, l’instabilité de l’euro», conclut René Defossez.

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Mao surf biensur mais aussi batterie a ces temps perdus